Au début des années 1790, Vienne offre le tableau d’un drôle de passage de flambeau dans la vie musicale. A soixante ans et au sommet de sa carrière, Haydn vient tout juste de rentrer d’une tournée triomphale de concerts à Londres, et a bien du mal à croire la nouvelle récente de la mort de son cher ami Mozart, tandis que le jeune Beethoven, aussi doué au clavier que rustre dans ses manières, vient de quitter sa ville natale de Bonn et débarque dans la capitale impériale pour y recevoir des mains du premier l’esprit du second. Les relations entre les deux hommes seront pour le moins tumultueuses : jalousie de l’aîné devant le talent hors-norme du cadet ? arrogance de celui qui pense n’avoir plus déjà plus rien à apprendre ? Il reste qu’avec son Opus primum, Beethoven, qui s’est déjà fait remarqué par l’aristocratie viennoise pour ses exceptionnels talents d’improvisateur au clavier, veut marquer les esprits. Ce sera donc trois trios avec piano, dans lequel le compositeur révolutionne de fond en comble un genre dans lequel Mozart ou Haydn s’étaient pourtant illustrés : ajout d’un quatrième mouvement, rôle plus individualisé de chaque musicien, développements plus longs et plus complexes des motifs. Le trio avec piano est désormais mûr pour entrer dans l’âge romantique, mais les couleurs des instruments anciens nous rappellent ici par contraste tout ce que le jeune Beethoven doit à son maître Haydn, et comment il tente en permanence de s’affranchir de son modèle.
PROGRAMME
Haydn • Trio n°43 hob XV 27 en do majeur
Beethoven • Trio en mi b majeur op 1 n°1
Haydn • trio all’ungherese n°39 hob XV 25 en sol majeur
Victor Julien-Laferrière : violoncelle
Justin Taylor : piano-forte
Julien Chauvin : violon & direction
Le Concert de la Loge